Par une nuit de grand froid, première nuit d'une nouvelle année, un soldat, élite du pays, protégeait le sommeil des défenseurs de la patrie...

Les minutes s'écoulaient nonchalantes, sûres de leur pouvoir. Déchiffrer les inscriptions gravées dans le bois de la guérite donna au vaillant garde matières à réflexion, dans ce monde de silence, en ce moment avancé de la nuit...

Tous ceux qui attendirent l'aube dans cet abri si précaire matérialisèrent leurs aspirations, leurs rêves. Françoise, Lucie, Huguette, Marie-France, Véronique, Odile, Jacqueline, Henriette, Brigitte ne connaîtront jamais cette preuve d'affection ou d'amour qui, peu à peu, disparaitra sous une autre inscription ou sous une couche de peinture dévastatrice...

Cette constatation fit prendre conscience à la sentinelle en faction de la profondeur de sa solitude. Des copains, des copines, des poignées de mains, des souvenirs, beaucoup de choses qui comptent mais qui lui cachaient un manque profond...

Confiant (?) en l'avenir, le soldat de vingt-trois ans se dit que rien n'est joué, que, peut-être un jour, quelque choses de plus puissant s'emparera de lui... Que, peut-être un jour, deux êtres se partageront tout, soucis et joies, et que, alors, il se souviendra avec amusement des réflexions qui lui vinrent à l'esprit un premier janvier dans une guérite, là-bas, à Horb en Allemagne de l'Ouest.

Mirovinben - janvier 1974